Dépassement du délai de 14 jours pour l'envoi d'un PV de circulation routière : quelles en sont les conséquences en Wallonie ?
Le respect du délai légal pour l’envoi du procès-verbal d’infraction routière est crucial, car son dépassement peut affecter la validité des constatations et la présomption de culpabilité, influençant ainsi les décisions judiciaires. Olivier Evrard, avocat spécialisé en droit de la circulation routière en Wallonie, vous explique les conséquences du dépassement du délai de 14 jours pour l'envoi d'un PV de circulation routière.
Force probante particulière des constatations des agents verbalisateurs
La loi relative à la police de circulation routière dispose en son article 62 que les constatations des agents qualifiés et de leurs appareils de mesurage (notamment, les « radars ») font foi jusqu’à preuve du contraire sous certaines conditions.
Pour cela, ce même texte légal prévoit que la copie du procès-verbal doit être envoyée au contrevenant dans un délai de 14 jours prenant cours à la date de la constatation des infractions (et non à la date de la rédaction du procès-verbal de constatation). Lorsque l’infraction a été constatée par un appareil automatique et en l’absence d’un agent qualifié, c’est ce constat qui sert de point de départ au délai de 14 jours (et non le jour où l’agent verbalisateur relève les enregistrements du radar).
Dès réception du procès-verbal, le titulaire de l’immatriculation peut alors soit confirmer être l’auteur de l’infraction, soit contester cette qualité.
Une présomption de responsabilité à charge du titulaire personne physique de l’immatriculation
La question du respect du délai de 14 jours pour la transmission du procès-verbal de constatation est à mettre en lien avec celle de la présomption légale de culpabilité à charge du titulaire personne physique de l’immatriculation.
L’article 67bis de la loi du 16 mars 1968 relative à la police de la circulation routière dispose ce qu'il suit : une infraction commise avec un véhicule immatriculé au nom d’une personne physique est présumée avoir été commise par le titulaire de cette immatriculation dans l’hypothèse d’un conducteur non identifié au moment de la constatation de l’infraction. La loi belge prévoit donc une présomption de culpabilité à charge de la personne physique titulaire de l’immatriculation. Cette présomption peut cependant être renversée.
Pour renverser la présomption de culpabilité, la personne physique titulaire de l’immatriculation doit remplir une double condition. Premièrement, il doit démontrer qu’elle n’était pas au volant du véhicule. Deuxièmement, il doit communiquer l’identité du conducteur incontestable du véhicule au moment de l’infraction (sauf preuve de vol, de fraude ou de force majeure).
L’importance du respect du délai de quatorze jours en matière d'infractions de circulation routière
Le délai légal de 14 jours doit être respecté par les services de police pour l’envoi de la copie du procès-verbal de constatation. Ce délai a pour objectif de permettre au contrevenant de disposer encore de la possibilité de fournir la preuve contraire des constatations.
À titre d’exemple : si un radar constate qu’un véhicule a commis un excès de vitesse, mais que le procès-verbal n’est envoyé qu’un mois plus tard, il pourra s’avérer difficile pour le titulaire de l’immatriculation de se souvenir s’il conduisait effectivement le véhicule le jour des faits et, surtout, d’en apporter la preuve.
Absence de mention de la date de transmission sur le PV
Compte tenu des éléments qui précèdent, il est donc important de vérifier à quelle date la copie du procès-verbal a été envoyée et si celle-ci contient une mention relative à la date de son envoi.
Si le procès-verbal ne précise pas la date de son envoi, qu’aucun cachet n’apparait sur l’enveloppe contenant le procès-verbal et que le contrevenant conteste l’avoir reçu dans le délai légal de quatorze jours, la présomption de culpabilité dans le chef du titulaire de l’immatriculation du véhicule pourra alors être contestée.
Renversement de la charge de la preuve
En cas de dépassement du délai de quatorze jours, il n’appartient plus au titulaire de la plaque d’immatriculation du véhicule de démontrer que l’infraction a été commise par un tiers et d’en rapporter la preuve. Autrement dit, la preuve de la culpabilité incombe au Ministère public.
À cet égard, de récentes décisions de justice ont confirmé l’importance du respect du délai de 14 jours et l’incidence du non-respect sur la culpabilité. Cependant, il convient de garder à l’esprit que toute constatation dépourvue de la valeur probante légale conserve sa valeur de renseignement, avec pour effet qu’un tribunal pourra considérer que les éléments soumis à son appréciation suffisent à considérer que l’auteur de l’infraction routière est bien le titulaire personne physique de l’immatriculation.
Autrement dit, un dépassement de quelques jours n’entraînera pas nécessairement un abandon des poursuites ou un acquittement. Tout dépend des circonstances et une contestation abusive pourrait entraîner des sanctions plus sévères.
Transmission tardive du procès-verbal
Afin d’éviter d’alourdir la preuve contraire pouvant être rapportée par le titulaire de l’immatriculation, la loi belge prévoit que le non-respect du délai de quatorze jours pour l’envoi du procès-verbal au contrevenant a pour première conséquence la suppression de la force probante particulière des constatations contenues dans le procès-verbal.
En cas de dépassement, les constatations ne font plus « foi jusqu’à preuve du contraire », mais ne valent alors plus qu’à titre de simples renseignements dont les tribunaux apprécient souverainement l’importance.
Par ailleurs, l’on considère également que ce dépassement du délai de 14 jours entraîne une seconde conséquence, à savoir la suppression de la présomption de culpabilité du titulaire de l’immatriculation du véhicule concerné. Ce principe a été récemment rappelé par un arrêt rendu en 2023 par la Cour de cassation, rappelant que l’absence d’envoi d’un procès-verbal dans le délai légal et la difficulté accrue qui en résulte d’en ébranler la force probante font disparaître la présomption de culpabilité du titulaire de la plaque d’immatriculation du véhicule.
Par un arrêt rendu en mai 2024, la Cour de cassation a encore confirmé ce qui précède en confirmation sa position même lorsque le délai précité de 14 jours « n’est dépassé que de peu ».
Comment cela fonctionne en pratique ?
Dans la pratique, les tribunaux n’appliquent pas la jurisprudence de la Cour de cassation de manière uniforme. Certains tribunaux appliquent strictement la sanction du dépassement du délai. D’autres non dans certaines circonstances. Certains juges, encore, considèrent qu’un dépassement de quelques jours ne doit pas remettre en question la présomption de culpabilité. Il n’est donc pas possible de garantir le résultat.
Il convient, en définitive, de retenir que le tout relève de l’appréciation souveraine du juge, lequel peut tenir compte des éléments propres à chaque dossier.
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